Les Pratiques de l'Iran envers les Réfugiés Afghans
- Oral Toğa
- 24 déc. 2023
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 juin 2024

Le ministère des Réfugiés et du Rapatriement de l'Afghanistan a récemment déclaré que l'Iran avait expulsé environ 7 000 réfugiés afghans vers l'Afghanistan le mois dernier. De même, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a annoncé en juillet que l'Iran avait capturé et expulsé 65 % des réfugiés entrés récemment dans le pays. En fait, cela représente la continuation d'une tendance croissante depuis deux ans. L'année dernière, l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) avait également fait une déclaration similaire, indiquant que plus d'un million d'Afghans avaient été expulsés tout au long de l'année. Considérant que la population de l'Afghanistan est d'environ 40 millions, l'ampleur de ces chiffres est notable.
Outre ces expulsions, depuis avril, des vidéos de violences envers les réfugiés afghans en Iran ont commencé à apparaître sur les réseaux sociaux. Les tensions augmentent aussi au sein de la communauté, avec de mauvais traitements infligés aux réfugiés capturés à la frontière. Par exemple, les déclarations récentes de Mohammed Taki Irani, vice-gouverneur de Bushehr en charge des Affaires politiques, de Sécurité et Sociales, ont suscité des controverses. Irani a averti que les citoyens "honorables" de la province ne devraient ni louer de logements ni de propriétés aux réfugiés, ni leur fournir de l'aide pour se loger ou trouver un emploi, sous peine d'intervention des forces de l'ordre et de sanctions contre ceux qui ne déclarent pas ces personnes. De plus, dans tout l'Iran, le nombre de patrouilles de police a augmenté dans les zones où vivent principalement les réfugiés, et les contrôles routiers se sont intensifiés, entraînant l'arrestation et l'expulsion des Afghans voyageant sans documents.
Des entretiens avec des sources sur le terrain indiquent que cette pression iranienne, combinée à la détérioration des conditions économiques en Afghanistan, a entraîné une augmentation des réfugiés afghans en Turquie. La plupart des Afghans arrivant en Turquie ont résidé ou travaillé en Iran entre 5 mois et 20 ans et sont passés par l'Iran en transit depuis l'Afghanistan. Souvent, les plus jeunes membres de la famille sont envoyés en Iran ou en Turquie pour gagner de l'argent. Ces jeunes, généralement des hommes célibataires, travaillent dans certains secteurs en Iran et, face à des problèmes, décident de se rendre en Turquie.
Une pression similaire s'exerce sur les réfugiés afghans au Pakistan. De nombreux réfugiés voient leurs documents non renouvelés ou annulés, ce qui augmente le nombre de ceux vivant illégalement et privés de leurs droits légaux au Pakistan. En conséquence, des protestations ont eu lieu dans les deux pays. Par exemple, le 19 avril, des dizaines de réfugiés à Islamabad se sont rassemblés devant le bureau du HCR avec des banderoles disant : "Tuez-nous ou sauvez-nous de ce mauvais sort". Des manifestations similaires ont eu lieu en Iran, mais elles ont parfois tourné à la violence. Au début d'avril, un groupe de manifestants a lancé des pierres contre le consulat iranien à Herat, scandant "Mort à l'Iran", ce qui a provoqué la colère des Iraniens et a créé des tensions entre les deux pays.
Les autorités iraniennes et pakistanaises considèrent la question des réfugiés comme un problème de sécurité nationale et ont intensifié les expulsions. Le Pakistan a achevé 94 % de la construction de sa clôture à la frontière avec l'Afghanistan. Par ailleurs, entre fin 2021 et février 2022, environ 100 Afghans tentant d'entrer en Iran par des points de passage clés tels que Zerenc et Islam Qala ont été tués par les forces de sécurité iraniennes, et 460 autres ont été blessés. Ces blessés ont été maltraités par les forces de l'ordre à la frontière, selon les familles des victimes.
Le problème des réfugiés afghans occupe l'Iran depuis 40 ans avec des hauts et des bas. Les mesures sévères récemment prises par l'Iran poussent les réfugiés établis à chercher de nouvelles options. Il est probable que ceux qui ne veulent pas retourner dans leur pays quittent l'Iran et le Pakistan pour se rendre en Turquie. La Turquie, ayant déjà renforcé sa sécurité frontalière et accéléré les expulsions, est susceptible de ressentir moins cet afflux comparé aux années précédentes.
Cet article a été initialement publié en turc le 24 octobre 2022 par le Centre d'Études Iraniennes (IRAM).
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